Bretonne exilée, c'est un job à temps plein.

Encore là, toi ? Oh, ça va, fais pas la tête c'était une petite boutade pour commencer. Hier je t'ai entendu donner des coups de pieds dans le mur. La violence ne résout rien, tu sais. Demande poliment, avec gentillesse et tact. Là, et seulement là, peut-être que ta requête sera entendue.

En ce moment, je te parle mais tu n'écoutes pas beaucoup, on dirait. Qu'est-ce qu'il se passe ? Tu as des soucis ?

T'as raison, ça m'intéresse pas. Je voulais juste être civilisée, mais pas besoin. On est là pour moi.

Je te parle assez durement, mais tu sais, au fond de moi se cache un vrai cœur d'abricot.

Je suis allée faire les courses à l'Eroski tout à l'heure. Le maïs, les pâtes, le riz, les yaourts, .. Tout y était. Et une fois à la caisse, je me dis que je vais prendre aussi du pain. Cependant, que mange-t-on avec le pain ? C'est ça ! Tu as trouvé la réponse. Du beurre (bretonne exilée, certes, mais bretonne quand même). Je vais dans le rayon frais et balaie l'étalage du regard : fromage, crème fraîche, beurre doux, yaourt nature, au chocolat, aux fruits, ..

Attends, Whaaaaaat ?

Mais, où est le .. le beurre salé ? Le beurre Président vert ? Il n'y a que le paquet rouge, le doux, le pas bon, le beurk.

Perdue que j'étais. Perdue. Tu t'imagines bien qu'à cet instant précis c'était le gros m'allaeizh.

Je prends mon courage à deux mains (vu la taille de mon courage, le pouce et l'index auraient suffit) et je vais voir la rangeuse-dans-les-étalages du magasin.

« Il y en a plus ? Il est rangé ailleurs ? Pourquoi il est plus à coté du rouge ? »

La pauvre a pas du comprendre grand chose. Ceci dit, elle a été diplomate. Gentille, souriante (tu m'étonnes, elle devait être morte de rire) et aidante (aidante ? Aid... Aidap'?). Et là, la phrase qu'il ne fallait pas. Elle me reste en travers de la gorge. J'ai presque du mal à te la dire tellement elle est blessante. Presque insultante. « Comme ici on n'en mange et que pendant quelques semaines le produit ne s'est pas vendu, on l'a retiré. »

Je pars 2 semaines en vacances pour Noël et on m'enlève mon beurre salé ?

Et si j'achète plus de salade, d'un coup, pendant carrément un mois, on arrête de produire de la salade dans tout le Pays Basque ?

Ah, tu le crois pas, toi non plus, hein ?

J'ai payé, et je suis rentrée chez moi. En arrivant, je me suis effondrée sur mon lit, (avale ta salive de temps en temps, ça goutte, ça salit mon sol. T'es chez moi quand même) pleurant à chaudes larmes. Mon précieux …

Ne t'inquiète pas, j'irai demain en chercher dans un autre Eroski. Mais arrête de pleurer, je te dis, c'est pas grave, j'en trouverai ailleurs. Bon, ça suffit, tes larmes sont captivantes, mais t'entendre renifler m'insupporte. T'es un drôle d'ami, toi. Tu dis que tu veux bien m'écouter et puis après tu monopolises tout.

Nan mais c'est vrai, un peu d'humilité.

PokPok,

Pallaeizh, mais alors pas du tout.